Par Sebastian Leck
Janey Harper adore la beauté naturelle de Whistler : les majestueuses montagnes, les lacs et les forêts de conifères qui l’entourent… Mais elle s’inquiète sans répit du développement incessant des centres de ski dans la région.
Retraitée depuis 16 mois à Whistler, Jane Harper n’est pas la seule à s’en faire. Plusieurs autres retraités se sont installés dans les environs et se questionnent, comme elle, sur les effets de ce développement. « Nous vivons en plein nature, et c’est vraiment particulier! Nous voulons préserver cet environnement », dit-elle.
Bien que l’environnement naturel de Whistler demeure vierge en majeure partie, le développement de la région a entraîné une perte de la biodiversité. Soixante-dix pour cent des milieux humides, qui couvraient autrefois le bas de la vallée, est disparu. Vingt-six espèces ont été inscrites sur la « liste rouge » en 2016, ce qui signifie qu’elles sont menacées de disparition, ou près de l’être.
Comme l’essentiel de l’information concernant les enjeux environnementaux de Whistler provient du journal local, Mme Harper a voulu en savoir plus sur ce qui se passait réellement sur le terrain. Elle a donc participé au premier Vital Café de la Fondation communautaire de Whistler, un volet du programme Signes vitaux.
Chaque mois, un groupe de résidents locaux débattent d’un enjeu lié à l’un des 17 objectifs de développement durable des Nations unies. Jusqu’à maintenant, ils parlé de pensée écologique, de la pauvreté à Whistler, de changements climatiques et des bénéfices de l’apprentissage collectif.
Mme Harper a assisté à la rencontre « Penser comme une montagne », qui s’est tenu le 22 janvier, au Musée de Whistler. Le titre est inspiré de la pièce A Sand County Almanac , qui décrit les conséquences de l’élimination des loups sur l’écosystème d’une montagne. Une œuvre du défenseur de l’environnement Aldo Leopold (1949).
L’explosion de la saison touristique à Whistler – et l’afflux de visiteurs qui s’ensuit – ont occupé beaucoup l’espace de discussion. Près de 3,5 millions de visiteurs ont vu Whistler en 2016-2017, un record de fréquentation. « Il y a des préoccupations quant aux responsabilités de ceux qui s’occupent des stations dans cette communauté; ils doivent être imputables. Nous ne voulons pas perdre ce qui nous tient à cœur », souligne Mme Harper.
Les ODD peuvent paraître abstraits. La Fondation veut les traduire en enjeux « terre à terre » pour la communauté de Whistler. « Les gens peuvent se sentir impuissants face à de grands enjeux comme les changements climatiques et la pauvreté, explique Carol Coffey, directrice générale de la Fondation communautaire de Whistler. Nous voulons qu’ils comprennent qu’ils ont un pouvoir d’agir, individuellement. »
« Penser comme une montagne » peut être relié à plusieurs ODD, comme la création de villes et de communautés durables, ainsi que la consommation durable.
Le deuxième Vital Café, sous le thème « Oui, il y a de la pauvreté à Whistler », se réfère à l’objectif de réduction de la pauvreté sous toutes ses formes.
Les rencontres démarrent par des présentations d’experts sur le sujet, avant de mener à une discussion entre les participants.
Le projet Signes vitaux de la fondation vise à informer les résidents de Whistler, et plus encore, à les outiller pour faire face à ces problèmes. Lors des rencontres, les participants sont invités à répondre à trois questions : quelles sont leurs expériences personnelles en lien avec le sujet? De quelle façon cet enjeu s’applique-t-il à la communauté de Whistler? Et quelles actions peuvent être entreprises?
« Les gens aiment bien parler de ce que le gouvernement devrait faire, mais on doit aussi les encourager à penser à ce qu’ils peuvent faire, individuellement », insiste la directrice générale. Lors de la rencontre sur la pauvreté, par exemple, les participants ont réalisé qu’ils pouvaient offrir du mentorat aux plus jeunes, partager leur expertise en atelier et créer des environnements de travail plus sains, capable de prévenir un sentiment d’isolement chez les employés.
Mme Coffey souhaite que ces cafés contribuent au sentiment d’appartenance. Selon le rapport Signes vitaux 2018 de Whistler, la communauté locale se porte bien, en termes de vitalité, mais les nouveaux arrivants peuvent avoir de la difficulté à créer des relations de proximité. Près d’un cinquième (19 %) des participants au sondage entretenaient « un faible ou très faible lien » avec la ville. Un fait qui peut s’expliquer par l’importance de la population saisonnière, comme les skieurs qui n’y restent que quelques mois.
« La population tourne autour de 11 000 personnes mais, à certains moments de l’année, elle grimpe à 35 000, souligne Coffey. Tous ces visiteurs ont un impact immense sur la communauté locale et les résidents à temps plein de Whistler. »
Afin de favoriser la convivialité et les discussions ouvertes, les Vital Cafés sont de petite taille, accueillant un maximum de 15 personnes. La fondation prévoit renouveler cette expérience sur une base mensuelle.
Janey Harper décrit le café auquel elle a participé comme « une réunion de famille où tu te retrouves avec tout le monde pour découvrir ce qui s’est réellement passé ». Elle a apprécié, tout particulièrement, le fait que personne ne tourne autour du pot. « Tout de suite, on parle des vraies affaires. Et ça, c’est très puissant. »
Le Vital Cafés ont lieu tous les mois au Musée de Whistler : www.whistlerfoundation.com/vital-signs/