Dans le vaste panorama du mouvement climatique, émergent des voix uniques portant des récits de passion, de lutte et d’engagement. Chúk, activiste et cerveau derrière le 3e Espace, incarne cette voix singulière qui cherche à transformer ses idées en actions concrètes. Dans cette entrevue, Chúk partage avec nous son parcours, les défis auxquels il a fait face dans le secteur environnemental et ses espoirs pour un avenir plus durable et inclusif.

Chúk raconte avoir traversé de nombreuses crises existentielles en grandissant et avoir ressenti une sorte de connexion spirituelle avec la nature ainsi qu’un sentiment de bien-être. « Je me sentais bien dans la nature, même si je ne me considérais pas comme un amoureux du plein air », explique-t-il. Ce dernier ajoute qu’il ne se considérait pas comme un adepte des activités en plein air car il ne voyait pas de personnes comme lui [PANDC] dans la nature et ne se reconnaissait pas dans la culture nord-américaine des espaces naturels en raison du manque de représentation et des stéréotypes liés à cette culture des activités en plein air.

Cet intérêt et cette connexion avec la nature l’ont amené à explorer les sciences de l’environnement à l’université, où un projet de fin de session l’a propulsé dans le monde de l’activisme climatique. Pour ce projet, il avait le choix entre une revue de littérature et un projet où il devait montrer comment il avait contribué à changer le monde. À cette époque, étant mannequin, il a donc produit une série photo dans la nature et a envoyé les photos à l’ONU. Cette série de photos était accompagné par un essai dans lequel il parlait de l’éloignement de la société occidentale de la nature et que dans sa vision verte si l’humain considère la nature comme partie de lui il pourra on sera capable d’avancer vers un avenir beaucoup plus durable. Je vous partage un extrait ‘Only when we see the environment as part of who we are, who we will be, and what will become of us, can we truly move forward towards creating and maintaining a sustainable future’’. L’ONU a publié les photos et il a été nommé l’un des 25 meilleurs écologistes de moins de 25 ans au Canada. Ce moment a été une révélation pour lui, réalisant que sa voix était « importante, nécessaire et désirée » et qu’elle avait  donc de la valeur pour le mouvement. 

En disant cela, Chúk souligne également le manque de diversité dans le mouvement environnemental et son désir d’y remédier. Ayant travaillé avec diverses organisations, il note l’importance de reconnaître l’oppression intersectionnelle dans la lutte pour la justice environnementale. 

Dans le secteur environnemental, Chúk a été frappé par diverses lacunes qu’il a observées au fil des ans. Parmi ses observations, il a noté un certain racisme latent dans les messages véhiculés par certains groupes environnementaux, en particulier lorsqu’il s’agissait de la lutte contre le changement climatique ‘via la lutte contre’ la surpopulation en Afrique. Il a également dénoncé un certain entre-soi au sein du mouvement environnemental, pointant du doigt la tendance à accorder une culture unique à l’environnement, ce qui, selon lui, exclut inévitablement certaines personnes.

Après avoir travaillé avec les parcs canadiens, Chúk a été frappé par le manque de représentation dans la publicité de Parcs Canada, ce qui l’a amené à réfléchir sur l’importance de la diversité et de l’inclusion dans tous les aspects de la société. Ces expériences ont renforcé sa conviction en faveur d’une lutte commune pour la justice sociale et environnementale.

Cherchant à échapper à l’augmentation exponentielle du coût de la vie dans les centres urbains, Chúk a déménagé à Falher, une ville francophone en Alberta. Ce déménagement n’était pas seulement une décision économique, mais aussi un acte de résistance pour préserver sa maîtrise du français qu’il commençait à perdre à Calgary. Il a aussi souligné le fait que de nombreuses personnes racisées restent confinées dans les centres urbains en raison de la peur de l’exclusion sociale et du racisme, vivre dans une ville rurale est une façon pour lui de défier ces croyances.

Dans sa nouvelle communauté, Chúk remarqua rapidement le manque de tiers-lieux. Il fut inspiré par son implication dans la Fellowship Emerging Urban Leaders, qui visait à améliorer l’accès à la nature pour les habitants des centres urbains. Le programme Emerging Urban Leaders répond à la demande croissante d’accès à la nature dans les espaces urbains. Lancée en 2021, cette initiative crée un réseau composé d’architectes, d’urbanistes, d’organisateurs communautaires, de décideurs politiques et de défenseurs de l’environnement, qui sont associés à des mentors pour élaborer des solutions innovantes et des villes de qualité pour l’avenir.

Cette expérience l’a amené à envisager la création d’un espace communautaire ancré dans la terre qui servirait de tremplin pour les discussions sur l’environnement, la tolérance et l’inclusion.  Partager un espace vert ensemble pour penser à la terre, développer un sentiment de communauté et un sens de vivre ensemble. Il s’est inspiré aussi du concept de 15 mins city comme à Barcelone avec cette vie de quartier.

Le projet vise à  créer un jardin intérieur  inspiré par le jardin Devonian à Calgaryafin de sensibiliser et construire, responsabiliser, inclure et éduquer autour du climat. Il espère que le 3e Espace deviendra un catalyseur pour l’action climatique et un melting pot pour la communauté locale et les nouveaux arrivants dans sa région.

Avec le soutien de divers groupes communautaires, Chúk a élaboré un plan d’affaires pour son projet, le 3e Espace. Le 3e Espace se distinguera par son engagement en faveur de la résilience, de l’inclusion et de l’action climatique, offrant ainsi un lieu où les gens peuvent se rencontrer, s’éduquer et agir sur les enjeux climatiques tout en se sentant chez eux. Même si le projet en est à ses premiers pas, Chúk note un fort soutien de la communauté et des collaborations en cours avec divers groupes communautaires locaux. 

Chúk espère que le 3e Espace deviendra un projet réplicable en Alberta. Son projet est non seulement une réponse aux besoins de sa communauté, mais aussi une déclaration audacieuse contre l’exclusion et le racisme, ancrée dans une vision de résilience et de résistance face aux défis climatiques actuels. Le projet prévoit de commencer la construction en Juillet 2024. 

Pour finir cet entretien j’ai demandé à Chúk quel avait été son plus grand défi dans le secteur environnemental.

Il m’a répondu; qu’être noir avait été son plus grant défi que ce soit par rapport à son emploi ou dans son engagement environnemental. Par rapport à son projet il ajoute qu’il a également rencontré des obstacles financiers dans l’élaboration de son projet soulignant la frilosité des banques canadiennes à prêter à des projets innovants et l’importance de fonds comme ceux du Havre Jeunesse. Il envisage des coûts de 100 000 CAD = pour la construction

50 000 CAD = pour le design intérieur. Il reste cependant optimiste quant au potentiel de son projet 30 000 CAD = pour les opérations pour les premiers 6 mois. La réception positive de son idée et le soutien de celle-ci par la jeunesse constituent des victoires pour lui. Chúk espère que le 3e Espace deviendra un modèle pour d’autres communautés et inspirera un changement positif dans le mouvement climatique.

À propos de l’auteur

Le Dr Chúk Odenigbo (PhD) est directeur-conseil de l’évaluation de l’impact au Centre d’apprentissage à l’institut Tamarack. Fièrement Franco-Albertain, Chúk est passionné par les manières dont l’environnement porte un impact sur la santé humaine et la question de la justice dans notre compréhension du fonctionnement de nos sociétés. En conséquence de sa passion, Chúk est très actif dans les espaces de changement au Canada et à l’international. Sa formation formelle comprend l’environnement, la chimie, la santé publique et la géographie médicale. Dans sa carrière, il se penche sur la justice environnementale et climatique, et hors de son travail, il est impliqué dans plusieurs conseils, comités, conférences et mouvements pour réimaginer et recréer nos systèmes pour le bien-être de tous les êtres. Humains et non-humains.